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Schiller Thriller de Massimo Furlan sa 3 et dim 4 sept. Festival de la Bâtie

Massimo Furlan et Claire de Ribaupierre ont été invités par le festival Schillertage de Mannheim à créer en juin 2011 un spectacle inspiré par l’œuvre de l’auteur allemand Friedrich von Schiller. Le projet a pour point de départ la leçon inaugurale prononcée par Friedrich Schiller à l’Académie d’Iéna, lors de son entrée en fonction en tant que professeur. Cette leçon de type académique porte sur la question de l’histoire et du progrès historique de la civilisation européenne de la fin du 18e siècle. Schiller dresse un portrait enthousiaste de l’éducation, de la société civilisée, des sciences et de la philosophie. Héritier des Lumières, il affiche une foi sans limite pour l’idée de progrès, progrès de l’homme éduqué, instruit, au commencement du capitalisme, de l’industrie et de la colonisation. Dans ce discours rhétorique et académique il n’est question ni des femmes ni des enfants, si ce n’est comme des êtres destinés à progresser, à « grandir », à entrer dans le système afin de le faire prospérer. Il est question des peuples extra- européens, « sauvages » et des animaux, comme des populations témoignant des origines de l’histoire, destinés à servir l’Europe, à suivre son modèle. Héritier de la pensée éclairée, de la foi en la raison et dans le jugement tel que Kant l’a instauré, et contemporain de Goethe, son maître, Schiller s’inscrit dans ce premier romantisme allemand qui s’avère classique au niveau de l’écriture, académique, et qui croit en la vertu des Idées et des valeurs morales. Le discours se veut optimiste et rassembleur. Ce texte est prononcé en 1789, au moment de la Révolution française. Pourtant de nombreuses questions présentes dans l’oeuvre dramatique de l’écrivain sont écartées de ce texte: la question de la violence, de la tyrannie, du meurtre, de la folie. Questions que le romantisme allemand met en évidence et traite de manière percutante: la nature, l’instinct, l’excès, la déraison et la révolte sont au coeur des oeuvres d’Hölderlin, Novalis, Büchner ou encore Nietzsche. Cette foi en la raison éclairée qui traverse le discours de Schiller, typique de la fin du 18e siècle, s’avère pour nous aujourd’hui naïve et aveugle sur ses propres fondements : elle est dominatrice, capitaliste, européo-centriste et machiste. Cette raison et cette foi en une histoire universelle encourageant les hommes à dominer le monde et à imposer leur modèle, aveuglés par l’idée d’un horizon lumineux, conduira en fait, comme le montreront Adorno et Horkheimer, à la folie de l’Occident, au massacre, à la destruction de l’altérité, et de la nature elle-même. Aussi le projet Schiller Thriller cherche à la fois à mettre en perspective cette pensée et ses contradictions, ses croyances et ses craintes dans une suite d’images symboliques, oniriques ou burlesques, dans un dispositif installatif qui devrait constituer une expérience de perception singulière pour le spectateur (l’obscurité, l’éloignement puis la proximité, le murmure des voix et la puissance de la musique, le déplacement dans l’espace,…).